jeudi, 25 juin, 2020
Tous les chevaux ne sont pas égaux d’un point de vue de leur tonus musculaire. Certains restent en bel état et toniques avec uniquement deux séances de travail par semaine, d’autres ont besoin d’être travaillés au quotidien. Avec pas plus d’un à deux jours de repos hebdomadaire pour entretenir une musculature répondant à leurs exigences sportives. Le cas de Marbuzet, décrit ci-dessous, est révélateur d’un cheval dans la seconde situation. Pour lui, dès lors, les 6 semaines de confinement n’ont pas été profitables et ce cheval manque de tonicité !
Retrouvez dans cet article les détails de cette consultation et des solutions pour remédier aux problèmes locomoteurs de Marbuzet.
L’article suivant a été rédigé par le Dr vétérinaire Eva Jonville. Pour mieux en saisir le sens, elle expose dans le paragraphe ci-dessous le déroulement de ses consultations :
“L’Acupuncture fait partie de mon approche première et occupe une place centrale dans mes consultations. Elles sont construites sur une base de Médecine Traditionnelle Chinoise. J’ai ensuite recours à l’Ostéopathie ou Médecine Manuelle, de façon synergique et complémentaire. Cela est utile pour lever les fixations structurelles de type musculo-squelettiques lorsque cela est nécessaire.
Enfin, selon les troubles rencontrés, après une séance d’induction par les aiguilles d’acupuncture, je peux proposer la mise en place d’un traitement par pharmacopée chinoise. Cela permet de prolonger les effets des aiguilles dans le temps, évitant ainsi des consultations rapprochées.
Le diagnostic s’opère et s’affine donc selon 3 grilles de lectures :
L’utilisation conjointe de l’ensemble de ces techniques les potentialisent réciproquement pour un maximum de résultats, le but étant d’offrir aux chevaux une médecine intégrative assurant un suivi complet, complémentaire et cohérent.
Ceci dit, il n’y a pas de consultation type : chaque cheval me guide vers ses besoins, auxquels je me limite pour ne pas rompre l’équilibre ni la dynamique en place. Il s’agit d’être succinct et précis dans le choix de l’information donnée à l’organisme et la/ les techniques employées.
Ainsi le choix dans la méthode de traitement relève d’un diagnostic individualisé précis, d’une connaissance approfondie des techniques thérapeutiques, couronnés d’une expérience continuellement nourrie et enrichie.”
Marbuzet, cheval de loisir de 7 ans, hongre, répond parfaitement aux attentes de sa propriétaire. Il sort en concours de sauts d’obstacles régulièrement. Il travaille aussi avec application sur le plat et aime l’extérieur. Cela dit, c’est un cheval dont la musculature nécessite un travail régulier pour rester tonique. 10 jours de pré et son dos se défait. À la reprise du travail après une période de repos, il faut insister pour le tendre, qu’il remonte son dos et contracte ses abdominaux. Ses déplacements latéraux sont moins satisfaisants, et à l’obstacle il se rapproche des barres et fait souvent des “petits pieds”. Mais là, après 6 semaines de confinement au pré, sa propriétaire craint qu’il se soit fait mal ou souffre d’arthrose (alors qu’il n’y avait pas de signes antérieurs au confinement) car il est « très raide des postérieurs ».
En réalité, Marbuzet montre un défaut de flexion et une instabilité des grassets :
Parce que Marbuzet n’a pas perdu que du dos et des abdos pendant cette période de repos, il a globalement perdu en masse et tonicité musculaire. Les écharpes musculaires qui consolident ses articulations sont moins performantes, le rendant plus instable et incertain dans ses mouvements. Le quadriceps fémoral en particulier fait défaut dans son rôle de traction sur la rotule et ne compense plus une probable laxité du ligament rotulien médial. La rotule au moment de la flexion du grasset a du mal à se « décrocher » du tubercule fémoral. C’est l’accrochement rotulien partiel.
Rq : la contraction du quadriceps fémoral engendre une rotation externe de la rotule et donc son « décrochement » du tubercule fémoral.
Le traitement conservateur est à privilégier et est graduel dans sa mise en place :
Tout d’abord, restaurer la tonicité musculaire, en particulier celle du quadriceps fémoral par des exercices sur le plat comme le passage de barres au sol au pas, le travail de deux pistes, les transitions et des dénivelés dans un second temps. L’acupuncture peut être très utile pour restaurer l’équilibre de l’articulation et la tension du ligament rotulien médial.
En seconde intention, si ces mesures ne sont pas suffisantes après quelques semaines, on peut pratiquer des injections locales au niveau du ligament rotulien médial et/ou stimuler un point d’acupuncture influent face interne du grasset. On pourra aussi adapter la maréchalerie.
Le stade critique, non décrit chez Marbuzet, est l’accrochage de rotule, persistant ou intermittent mais récurrent. Ce dernier est caractérisé par l’allure pathognomonique d’une jambe bloquée en extension avec le pied qui frotte en pince. Dans ce cas, le reculer suffit le plus souvent à débloquer la rotule, sinon il est nécessaire de procéder à une manipulation de la rotule elle-même. Si le cheval boite à l’issue de cet accrochement rotulien persistant, un traitement aux AINS (anti-inflammatoires non stéroïdiens) est mis en place. Dans les cas récurrents, si les traitements conservateurs ne s’avèrent pas suffisants, des traitements chirurgicaux peuvent être envisagés.
Mais aujourd’hui, après 6 semaines de barres au sol au pas en sus d’une activité habituelle, d’une maréchalerie adaptée et de quelques aiguilles d’acupuncture, Marbuzet reprend des options longues à l’obstacle et aborde les descentes d’un pas franc et confiant en extérieur !
Pour pallier ce défaut de locomotion et restaurer progressivement la tonicité musculaire, il est donc conseillé d’effectuer, sur plusieurs sessions d’entraînement, des exercices privilégiant les barres au sol犀利士 au pas, le travail sur deux pistes, et les transitions.
Le catalogue d’exercice Seaver propose un vaste choix d’exercices, dans plusieurs disciplines, facilement adaptables en fonction des installations dont le cavalier dispose. Chaque exercice est accompagné d’un ou plusieurs schémas explicatifs, de détails sur sa réalisation, et de conseils.
Dans le cas exposé, deux exercices en particulier peuvent contribuer à une amélioration de l’état physique du cheval.
Cet exercice, dont l’installation requiert 5 ou 6 barres au sol, présente plusieurs avantages. Il pousse le cheval à se prendre en charge, à faire attention et à rester un minimum tonique. Pour réaliser correctement cet exercice, il faut veiller à son impulsion et à sa rectitude.
Ce second exercice, lui aussi composé de barres au sol, intègre néanmoins dans ses étapes la réalisation de transitions. Il vous permettra de gagner en contrôle et en confiance, et incitera votre cheval à rester attentif. Sur votre premier passage de dispositif, effectuez une transition du pas vers le trot avant de franchir la dernière barre. Revenez sur le dispositif au trot après avoir effectué une volte ; puis, faites une transition du trot vers le pas avant la dernière barre au sol et votre sortie du dispositif. Une fois cette étape correctement effectuée, il est possible de varier et rapprocher ses transitions.
Étant donné que l’idée est de passer les barres au sol au pas pour obliger le cheval à fléchir les grassets et donc tonifier les quadriceps fémoraux, tout comme les exercices de latéralisation, médialisation des postérieurs, vous pouvez, sur les voltes, alterner hanches en dedans/dehors, ce qui permet de travailler rectitude sur les barres et deux pistes dans les figures.
Ces deux exercices et l’ensemble des explications et conseils de l’équipe sont à retrouver gratuitement sur l’application Seaver.
Marbuzet n’est pas un cas isolé, en particulier après cette période de confinement. Il s’agit ici d’un cas de constitution associée à une conformation anatomique particulière que l’on peut retrouver dans toutes les races : constitution du cheval “Rate faible” en Médecine Chinoise Traditionnelle avec une fonction d’assimilation et d’utilisation des nutriments non optimale de laquelle résulte entre autres un manque de tonicité musculaire ; et conformation d’une articulation du grasset ouverte avec une laxité du ligament rotulien médial. Il n’y a ni fixation articulaire à proprement parlé ni lésion d’aucune nature dans le cas décrit ci-dessus et le retour à une locomotion normale s’effectue avec la participation active du cavalier. Ceci dit, le résultat dépend de la précision et pertinence du diagnostic car le traitement qui en découle peut être radicalement différent pour des signes cliniques d’un point de vue du cavalier assez semblable.
Nous espérons que cet article vous a plu !
À très vite pour un prochain article,
Dr Eva Jonville